CHAPITRE 4: LES MUTATIONS REGLEMENTAIRES ET LES SURCAPACITES BANCAIRES EN FRANCE

 

Le développement des comportements concurrentiels sur les marchés financiers à l'issue des mouvements de déréglementation et de libéralisations financières provoquent l'apparition de certains effets pervers qui peuvent être une source de fragilisation du fonctionnement bancaire. En effet, l'existence d'une situation de surcapacité bancaire en France constitue une réelle menace sur la rentabilité et la stabilité du système financier dans son ensemble. Il importe donc d'étudier cette surcapacité en essayant d'expliquer à la fois ses véritables sources et critères dans la banque ainsi que la nécessité de lutter contre ce phénomène.

SECTION 1: L'EXISTENCE DE SURCAPACITÉS DANS LA BANQUE

A - Définitions du phénomène de surcapacité :

Il existe plusieurs manières pour définir une surcapacité. Dans une approche classique de cette notion, une surcapacité existe lorsque les capacités de production d'une entreprise ou d'une industrie sont supérieures à celles qui garantissent une production efficiente. La surcapacité peut être également appréhendée comme un phénomène d'inefficacité relative [ D. Saidance (1995)]. Dans ce cadre, la surcapacité traduirait le phénomène de surproduction. Elle reflète l'excès de l'offre par rapport à la demande. Il s'agirait également d'une faible efficacité technique relative. Une surcapacité reflète donc une situation de déséquilibre entre la capacité de production ex-post de la firme et de sa capacité ex-anté. Supposons deux firmes A et B produisant une même quantité de produits notée Y1 pour A et Y2 pour B. Les deux firmes A et B utilisent respectivement X1 et X2 quantités d'imputs. Le processus de production des deux firmes est décrit de la manière suivante :

Y1 = a1 f(X1) et Y2 = a2 f(X2)

Avec a1 et a2 correspondant aux paramètres d'efficacité technique relative. La firme A est relativement plus efficace que B si a1 > a2 . Dans ce cas, B présente des défaillances reflétant une utilisation moins performante des capacités de production par rapport à la firme A.

B - La déréglementation comme principale source de surcapacité dans la banque

L'accroissement de la concurrence et l'accélération des innovations financières au cours des dix dernières années, incitent les banques à surinvestir dans différentes activités qui dépassent les besoins solvables de la clientèle : cela génère ainsi une prise de risque excessive nuisible au système financier dans son ensemble. De ce fait, la déréglementation financière est tenue pour responsable dans l'apparition de certaines surcapacités dans l'industrie bancaire. Ces surcapacités peuvent être motivées principalement par la volonté de maintenir ou gagner des parts de marché et en luttant contre la concurrence effective et potentielle. Pendant longtemps, le contrôle des taux d'intérêt a limité la concurrence par les prix et a favorisé la concurrence par la proximité ou la qualité. Cette concurrence s'observe par exemple dans la course aux guichets, qui est un phénomène qui a commencé à partir des années soixante-dix et qui s'est poursuivi au cours des années quatre-vingt. Le nombre de guichets bancaires a ainsi passé de 13918 en 1969 à 25409 en 1987.

Mais avec la déréglementation, des capacités de production existantes, sont sans doute devenues excédentaires, en raison du renforcement de la concurrence par les prix. De ce fait, l'intensification de la concurrence peut conduire les banques à essayer de se rattraper par les volumes. Cette stratégie est susceptible d'accentuer à son tour le phénomène de surcapacité dans la banque. De plus, pour lutter contre une concurrence aiguë, les banques seraient tentées de facturer au coût marginal. Or, étant donné l'importance des coûts dans l'activité bancaire, il est possible qu'une telle "guerre de prix" conduise à une forme de concurrence " destructrice " dont la principale conséquence serait la détérioration des marges bancaires. Ce qui présente en définitif une menace sur la stabilité et la sécurité du système bancaire.

Par ailleurs, certains auteurs comme Dietsch (1993), considèrent que les chocs de demande et les chocs technologiques ont favorisé l'apparition de surcapacités bancaires. En effet, au cours des années quatre-vingt, l'entrée de nouveaux concurrents, notamment des "non banques" sur certains marchés a provoqué une modification de la taille des marchés bancaires, qui paraît avoir diminué. Mais, cette réduction n'a pas été suivie d'un ralentissement de la progression de l'activité bancaire qui a continué de croître, provoquant ainsi l'apparition de surcapacités. De plus, les chocs technologiques, notamment avec les innovations financières, ont sans doute déterminé une situation de coûts décroissants à court terme et favorisé ainsi les surcapacités.

C - La surcapacité dans la banque

1 - Les critères de surcapacité dans la banque :

a - La surcapacité bancaire par rapport aux inputs réels :

La surcapacité bancaire peut être définie par rapport aux deux principaux inputs de la banque, à savoir le réseau de guichets et les effectifs. Dans ce cas, une banque peut souffrir de surcapacité si pour un taux de rentabilité global inférieur ou égal à celui des banques concurrentes, elle utilise plus de guichets et d'employés. La surcapacité bancaire apparaît ainsi comme un surplus de capacités inutiles et générateurs de gaspillages. En outre, la surcapacité des réseaux bancaires par rapport à certains commerces a été définie graphiquement comme l'écart entre le nombre de points de ventes et les fréquences des visites:

Graphique 4.1 : Source: Booz-Allen et Hamilton (1991) in D.Saidane (1995).

De ce point de vue, une surcapacité peut témoigner de l'existence de déséconomies d'échelle. De son côté Dietsch (1993), considère que des économies d'échelle inexploitées constituent une condition nécessaire et non suffisante pour l'existence des surcapacités parce qu'il est difficile de réduire l'absence de surcapacité à la seule présence d'économies d'échelle.

b - La surcapacité bancaire par rapport à l'activité d'intermédiation

Selon l'optique de l'intermédiation, la banque apparaît comme une firme produisant des crédits à partir des dépôts financiers gratuits ou rémunérés. La surcapacité peut donc s'apprécier par rapport aux ressources bancaires. Dans ce cas, une banque peut souffrir de surcapacité si pour une même offre de crédits et un même risque de défaillance, elle emploie plus d'inputs financiers que les banques concurrentes. Cette surcapacité peut également provenir d'une sous-exploitation du réseau. Ceci en drainant moins de ressources bancaires gratuites ou quasi-gratuites (dépôts à vue, dépôts d'épargnes faiblement rémunérés) au profit de ressources issues du marché des capitaux. Cette tendance semble se confirmer pour plusieurs pays européens entre 1980 et 1990, comme l'indique le tableau suivant :

Tableau 4.1 : Source: Booz-Allen et Hamilton (1991). Chiffres exprimés en pourcentage.

c - La surcapacité bancaire par rapport à l'activité de marché :

- Surcapacité provenant de l'excès du risque :

Cette surcapacité provient du fait qu'un développement exagéré de l'activité de marché peut conduire les banques à des engagements de plus en plus risqués. Dans l'industrie bancaire, les combinaisons productives sont des combinaisons d'actifs risqués. Il y a surcapacité si le niveau de risque global du portefeuille d'actifs d'une banque ou celui du système bancaire dans son ensemble augmente sensiblement par rapport à son niveau de rentabilité. L'observation suggère qu'au cours de ces dernières années, il y a eu une modification de la composition du portefeuille des banques, accompagnée d'une diminution des rendements et d'une augmentation des provisions. On observe en effet que le rendement moyen des crédits a diminué alors que le risque de crédit augmentait [Tableau 4.2].

Tableau 4.2 : Importance des risques de crédit dans les banques AFB

Source : Rapport 1994 de la Commission Bancaire.

Par ailleurs, la surcapacité par rapport à l'activité de marché peut également se référer au surdimensionnement de l'outil de gestion des risques [Pastré.O(1993)].

- Surcapacité provenant des suréquipements en salles de marché :

L'idée est que le développement de l'activité bancaire poussé par l'accélération concurrentielle conduit les banques à réaliser des investissements lourds en salles de marché nécessitant des équipements modernes et très coûteux. Mais, on remarque que ces surinvestissement en salles de marchés dépassent les besoins de l'industrie bancaire et sont générateurs de gaspillages. D'où leur niveau de rentabilité inférieur à celui escompté.

2 - Incidences des surcapacités sur l'industrie bancaire :

Une situation de surcapacité est synonyme d'une situation de sous-efficience. La présence de surcapacités implique que l'industrie bancaire ne fonctionne pas d'une manière efficace. Ces capacités excédentaires génèrent donc des gaspillages et impliquent des coûts supplémentaires. Ce qui peut conduire à une fragilisation du système bancaire. En effet, la lutte contre la concurrence génératrice de surcapacités implique des engagements de la part des banques dans des activités de plus en plus risquées et moins rentables dont la principale conséquence serait la poursuite de la détérioration des résultats bancaires. L'observation montre que les marges d'intérêts se sont réduites au cours de ces dernières années sans que cela n'implique une réduction de la taille des portefeuilles des banques. Ce qui entraîne une augmentation de la part des crédits sous-efficients et la montée des risques. Certifiant ainsi l'augmentation des provisions et la diminution des rendements moyens des crédits.

Dans la même optique, une industrie en surcapacité implique un niveau de rentabilité insuffisant pour couvrir l'ensemble des coûts fixes. Et puisque les coûts fixes sont élevés dans l'activité bancaire alors le rendement du capital est inférieur à son coût de long terme. De ce fait, la réduction des capacités excédentaires pourrait permettre la réalisation des profits plus élevés. La surcapacité implique également un coût supplémentaire en terme de traitement de l'information et de gestion des risques. Par ailleurs, la présence de surcapacités peut également témoigner de l'existence de déséconomies d'échelles. En effet, le calcul des rendements d'échelle issue de l'examen des fonctions de profit Translog et Cobb-Douglas a permis de déduire que les banques en France fonctionnent en rendements décroissants à l'égard de leur réseau de guichets surdimensionné [D. Saidane (1995)].

SECTION 2: LES SURCAPACITÉS DANS LA FIRME BANCAIRE EN FRANCE

A - Le surdimensionnement du réseau bancaire en France :

La plupart des études récentes ont conclu à l'existence d'une situation de surdimensionnement global du réseau bancaire en France.

1 - Le suréquipement en guichets

Pour vérifier l'hypothèse selon laquelle il y a suréquipement en guichets, Dietsch (93) propose de vérifier que la création ou l'augmentation du nombre de guichets est déterminée par des motifs autres que l'efficacité. L'analyse empirique de Dietsch porte sur des statistiques de 17 départements hors Ile-de-France et sur la période 1988-1992. Elle montre qu'il n'existe pas de relations étroites entre le maillage bancaire et les performances des guichets. Il apparaît de cette étude que les départements où le réseau bancaire est dense ne correspondent pas à ceux où les performances des guichets sont les plus élevés. L'existence d'une relation inverse entre la productivité des guichets et leur nombre confirme l'hypothèse de surcapacité. C'est ce qu'il indique le tableau suivant : Tableau 4.3 : Degré d'accessibilité et productivité des guichets ( chiffres en millions de francs ) Source : Dietsch.M(1993).

De plus, l'auteur indique que les performances des guichets ne sont pas plus élevées dans les départements où le nombre de guichets a augmenté. En effet, l'augmentation du nombre de guichets ne s'est pas accompagnée d'une augmentation de l'activité par guichet. Au contraire, on assisterait même à une diminution de l'activité moyenne par guichet ou du taux d'utilisation de leurs capacités. Le tableau (4.4) illustre cette constatation : Tableau 4.4 : Performances moyennes comparées des guichets sur la période 1990-1992 après l'implantation de nouveaux guichets ( données en %) *total des dépôts et des crédits par guichet Source : Dietsch.M (1993).

Par ailleurs, l'auteur constate que cette surcapacité semble être justifiée par des facteurs autres que des facteurs de performances, parmi lesquels des facteurs stratégiques. En effet, les nouvelles implantations de guichets seraient justifiées par le souci de gagner des parts de marché en matière de crédits. L'auteur montre que les implantations de nouveaux guichets sont positivement corrélées avec l'augmentation des crédits sur la période étudiée. Il apparaît enfin que cette surcapacité, induite principalement par des comportements stratégiques, conduit à une sorte de " guerre d'usure ". Aucune banque n'est incitée à réduire la première ses surcapacités. Ces comportements conduisent donc à la persistance du phénomène de surcapacité dans la banque.

2 - L'étude du surdimensionnement du réseau par la méthode des Ratios

La surcapacité du réseau peut être également appréhendée en examinant l'efficacité relative des banques par la méthode des Ratios [D.Saidane (1995)]. L'étude porte sur trois échantillons de banques AFB pour les années 1989, 1990 et 1991. Les échantillons retenus ont été classés en petites, moyennes et grandes banques. Les résultats de cette étude diffèrent suivant le critère de taille retenu. Tableau 4.5 : Classement en sous-échantillons Source : Saidane.D (1995).

a - Le nombre de guichets reflète un surdimensionnement dans les grandes banques : En retenant comme critère de classement le nombre de guichets, il apparaît que sur la moyenne des trois années retenues, les petites et moyennes banques affichent de meilleurs résultats que les grandes banques. En effet, les petites et moyennes banques affichent une meilleure rentabilité globale et par guichets que les grandes banques. L'accroissement du nombre de guichets de ces dernières ne ferait que dégrader leur efficacité. Ce résultat confirme donc les conclusions de Dietsch (1993) et de Muldur et Sassenou (1989). Ces derniers estiment que "l'avantage de la multiplication des agences semble s'amenuiser avec la taille de la banque pour devenir négatif pour les grandes banques".

Par ailleurs, D.Saidane note que les petites et moyennes banques sont mieux couvertes par rapport au risque. Les grandes banques prendraient donc plus de risques pour un niveau de rentabilité inférieur, notamment sur les opérations avec la clientèle. Cela résulte d'une logique stratégique en terme de proximité géographique pour gagner des parts de marché et lutter ainsi contre la concurrence effective et potentielle. b - Les résultats selon le nombre des effectifs et selon le total du bilan : L'examen de l'échantillon selon le critère du nombre des effectifs conduit D.Saidane à conclure à une efficacité relative des banques de taille intermédiaire et à l'absence de sureffectif pour les grandes banques. Les résultats obtenus confortent l'idée selon laquelle les banques de taille intermédiaire sont plus efficaces que les grandes. Mais, ce résultat autorise aussi à conclure que les banques de grandes tailles ne souffriraient pas de surcapacité par rapport aux effectifs et que l'emploi serait géré de manière rigoureuse. Par ailleurs, l'examen de l'échantillon selon le critère financier (le total du bilan) confirme les conclusions précédentes. Enfin, cette plus grande rigueur dans la gestion du personnel, conduit à penser que les grandes banques chercheraient à compenser la surcapacité de leur réseau par une gestion plus rigoureuse de leur effectifs. En effet, l'observation de la progression des effectifs dans les établissements de crédits en général sur la dernière période confirme la tendance à la réduction des effectifs salariés dans les banques. La recherche de gains de productivité a successivement ralenti, au début des années quatre-vingt, la croissance des effectifs des banques AFB.

On assiste depuis 1987 à un retournement de la situation et la diminution des effectifs ne cesse de s'accélérer avec (-0,9%) de fin 1987 à fin 1993 et (-2,5%) en 1993 [voir le tableau (4.6)]. A la lumière de cette tendance, il y a lieu de se demander si de telles économies sur le personnel sont suffisantes pour équilibrer les coûts induits par la surcapacité du réseau bancaire ?

Tableau 4.6 : Evolution des effectifs bancaires

Source : Banque de France - Direction des Etablissements de crédit.

B - La persistance des surcapacités et la réaction des banques en France :

L'identification de cette situation de surcapacité dans la firme bancaire en France suscite une vive interrogation sur les raisons qui expliquent la persistance d'un tel phénomène. De plus, les coûts et les pertes d'efficacité induits par le surdimensionnement du réseau bancaire, incitent de plus en plus à identifier les moyens nécessaires pour lutter contre cette faiblesse.

1 - Les principales raisons pour lesquelles les surcapacités persistent dans l'industrie bancaire

La correction des surcapacités dans l'industrie bancaire passe nécessairement par une meilleure compréhension des principales causes de persistance d'un tel phénomène. Dietsch (1993) identifie trois raisons pour lesquelles les surcapacités excédentaires demeurent dans la banque. Tout d'abord, la présence d'une proportion importante de coûts irrécupérables dans l'activité bancaire, surtout dans les activités classiques de production des dépôts et des crédits, n'encourage pas la réduction des surcapacités. Ensuite, la présence de coûts de contrôle trop élevés dans l'activité bancaire (coûts de contrôle des équipes dirigeantes par des investisseurs extérieurs) peut rendre l'élimination des surcapacités par cession d'actifs ou fusion plus difficile dans la banque que dans d'autres secteurs d'activité. Enfin, le maintien, voire l'installation de capacités excédentaires à des fins stratégiques est sans doute la raison principale qui explique la persistance d'un réseau surdimensionné.

En effet, face à l'accélération de la concurrence, les banques surinvestissent pour renforcer leurs positions concurrentielles sur les marchés et pour bloquer ainsi l'entrée de l'industrie aux concurrents potentiels. Ces surcapacités demeurent donc du fait qu'aucune banque n'a intérêt à réduire la première ses capacités. Les banques maintiennent leurs capacités excédentaires pour éviter ainsi de perdre des parts de marché au profit des banques concurrentes, voire même pour éviter de devenir en situation de sous-capacité. D'ailleurs, Schmid (1994) tente de montrer aussi qu'une sous-capacité bancaire induite par un faible nombre de guichets peut être socialement indésirable.

2 - La réaction des banques : Conscients des coûts et des pertes induits par cette surcapacité du réseau bancaire, les banquiers doivent réagir pour lutter contre ce phénomène. En effet, il semblerait que les banques souffrent de pressions sur leurs marges favorisées par la surcapacité et par la montée des risques. Les banques réagissent par la diversification et le développement des activités de marché. Mais, il importe de noter que de telles restructurations, encouragées par le développement de la concurrence, sont susceptibles à terme de générer à leur tour des phénomènes de surcapacité sur l'activité de marché. Ceci peut provenir par exemple de l'installation de salles de marché dépassant la taille du marché traité et excédant les besoins de la clientèle. Martin (1995) montre également qu'une concurrence bancaire motivée par la collecte de ressources bon marché peut conduire à l'implantation de nouvelles agences coûteuses et inefficaces. Ce qui risque d'accentuer le phénomène de surdimensionnement du réseau. Aujourd'hui, les banques sont confrontées à des impératifs contradictoires en matière de gestion de leurs réseaux du fait de la concurrence aiguë et des gaspillages induits par la surcapacité dans ce secteur. D'une part, la volonté d'améliorer la productivité des facteurs de production et de contenir les frais généraux incite les banques à rationaliser la structure de leurs implantations locales. D'autre part, les guichets sont un élément déterminant de la relation de proximité avec la clientèle. Mais y a-t-il vraiment une volonté réelle à la réduction du réseau de guichets en France ?

L'observation montre que la croissance du nombre de guichets en France métropolitaine enregistre un ralentissement depuis 1987, passant de 25409 à 25029 agences à la fin de 1993 [Avouyi-Dovi et Boutillier.M (1995)].

On constate, cependant, que cette tendance à la réduction des guichets n'est pas très marquée puisque le nombre de guichets permanent n'a fléchi que de 1,2% entre 1988 et 1993. Mais, cette évolution masque toutefois une rationalisation des réseaux dont témoigne par exemple la forte réduction des guichets non permanents. Le mouvement reste néanmoins modéré [ Rapport 1994 de la Commission bancaire]. Par ailleurs, peut-on penser comme Pastré.O (1993) que les restructurations en cours de l'industrie bancaire auront un effet d'autocorrection des capacités excédentaires. L'idée consiste à dire que la progression de l'installation des DAB et des GAB ( de 9033 en 1985 à 18735 en 1993) permettrait une exploitation plus intense du réseau conduisant à un ralentissement du surdimensionnement. Et témoignerait ainsi des efforts de rationalisation consentis par les banques françaises.

Pour conclure, l'existence d'une situation de surcapacité dans l'industrie bancaire en France remet en lumière le débat sur les véritables déterminants de la performance des banques. Aujourd'hui, la véritable garantie pour les banques d'une activité efficace et stable doit obligatoirement passer par une restructuration prudente de leur réseau en évitant les phénomènes de surcapacité. Le développement technologique et la modernisation de l'activité bancaire devraient conduire les banques à une meilleure exploitation de leur réseaux. Par ailleurs, l'idée selon laquelle la déréglementation est le principal responsable de l'apparition des phénomènes de surcapacité ne fait pas l'unanimité parmi les spécialistes. En effet, des auteurs comme Chiappori, Perez-Castrillo et Verdier (1995) considèrent, au contraire, que la déréglementation est salutaire dans la mesure où elle permet de gommer certaines surcapacités. Ils considèrent que c'est la réglementation des dépôts à vue ( la non-rémunération des dépôts à vue) qui constitue une source de surcapacité dans la banque en France. Le chapitre suivant va nous permettre d'expliquer ce point de vue.

Retour au sommaire

Suite : Chapitre 5